TF1 et M6, un mariage de raison qui fait sens
Destiné à résister aux plateformes de streaming américaines et à la concurrence publicitaire des Gafam, le rapprochement entre TF1 et M6 bouleverse le paysage audiovisuel français. Avec d’importantes synergies à la clé.
Le groupe allemand Bertelsmann, l’actionnaire majoritaire de M6 (48% du capital à travers RTL Group), n’avait pas caché sa préférence pour la reprise de sa participation au tour de table du numéro deux privé de la télévision française. TF1 figurait en tête de liste des repreneurs déclarés et le groupe allemand a su se mettre d’accord avec Bouygues, l’actionnaire de la première chaîne, pour unir leur force avec un schéma de rapprochement complexe. L’objectif est de concurrencer les plateformes de streaming américaines, Netflix et Disney+ et les réseaux sociaux (Google et Facebook) en termes publicitaires. L’annonce le même jour aux Etats-Unis d’un mariage entre Warner Media et Discovery montre la nécessité pour les groupes audiovisuels et de médias de regrouper leurs forces pour tirer leur épingle du jeu. Le mouvement dépasse donc les seules frontières hexagonales. Dans le cas de TF1 et M6, Bouygues va racheter au groupe allemand Bertelsmann une partie (11%) de sa participation (il conservera 16%) dans le nouvel ensemble contre la somme de 641 millions pour en devenir le premier actionnaire à hauteur de 30%. TF1 et M6 fusionneront sur la base d’une parité de 2,1 titres TF1 pour 1 action M6 (après versement chez TF1 d’un dividende ordinaire de 0,45 euro par action en 2022 et chez M6 d’un coupon exceptionnel de 1,5 euro par action s’ajoutant à celui ordinaire de 1 euro, les deux payables également en 2022). Fort d’un chiffre d’affaires de l’ordre de 3,57 milliards d’euros et d’un résultat opérationnel de 495 millions (en agrégeant les anticipations des analystes pour cette année), le nouvel ensemble sera dirigé par l’actuel patron de M6, Nicolas de Tavernost qui a démontré ses qualités de gestionnaire à la tête du numéro deux privé de l’audiovisuel français.
Le nouveau géant audiovisuel valorisé entre 5 et 5,9 milliards
Reste à convaincre le conseil supérieur de l’audiovisuel français de renouveler la licence de M6 pour émettre, qui arrive à échéance en 2023, et surtout les autorités de la concurrence au regard du contrôle par le nouveau groupe des deux tiers du marché publicitaire français. Pour autant, il y a fort à parier que les deux institutions ont été consultées en amont et que le problème devrait être résolu avec quelques concessions de la part de TF1 et de M6. Les experts du bureau de recherche d’Oddo-BHF semblent en tous les cas confiants sur la validation de l’opération et un poids du nouvel ensemble ramené à 60% du marché publicitaire. En attendant, les négociations vont prendre du temps et la finalisation du mariage entre TF1 et M6 n’est pas attendue avant la fin 2022. L’opération fait sens et permettra de générer d’importantes synergies estimées par le groupe allemand Bertelsmann entre 250 et 350 millions sur le résultat opérationnel du nouveau géant audiovisuel français trois ans après sa naissance. Toujours selon Oddo-BHF, le nouvel ensemble serait valorisé entre 5 et 5,9 milliards après versement des dividendes. Pour les actionnaires de TF1, cela valorise l’action entre 10,3 et 11,9 euros en tenant compte des dividendes, soit un potentiel d’au moins 14% sur les cours actuels. Pour ceux de M6, l’action vaut entre 24,1 et 27,6 euros, soit une plus-value potentielle d’au moins de 32%.
Notre conseil : achetez TF1 vers 8,8 euros pour viser un objectif de cours de 11 euros (code : FR0000054900 ) et M6 à 18 euros pour viser un objectif de cours de 24 euros (code : FR0000053225).