Alexandre Hezez, stratégiste de Banque Richelieu : « Nous visons un rebond des marchés actions de 6% à 8% »
En ce début de nouvelle année, l’usage veut d’établir des projections. Alexandre Hezez, le stratégiste de Banque Richelieu, nous livre ses perspectives.
Quel bilan tirez-vous d’une année boursière 2022 compliquée ?
Alexandre Hezez : Effectivement, 2022 restera une année compliquée que l’on peut décomposer en deux périodes. La première, jusqu’au mois de juillet, dominée par une accumulation de facteurs de risques géopolitiques bien évidemment avec la guerre en Ukraine mais aussi sanitaires en Chine avec la politique de tolérance zéro covid et une flambée d’inflation auto-alimentée par les hausses des salaires et des prix de l’énergie. En retard dans la normalisation de leur politique monétaire, les banques centrales ont alors brutalement remonté leurs taux directeurs. Depuis fin septembre, une deuxième étape se dessine, plus positive sur les marchés actions. Et ce, à la faveur de bonnes nouvelles sur les premiers signes de stabilisation, voire même décrue des chiffres d’inflation aux Etats-Unis, sur les échecs de la Russie en Ukraine, sur un assouplissement très progressif des mesures de restriction sanitaires en Chine et sur le peu d’impact de la victoire de Giorgia Meloni aux élections législatives en Italie. Aux Etats-Unis, la neutralisation au Congrès des partis conservateurs et républicains à l’issue du scrutin de mi-mandat constitue un élément rassurant pour les marchés en évitant un dérapage des finances publiques. Au final, les marchés actions ne s’en sortent pas trop mal. C’est surtout sur le compartiment des dettes que la correction a été violente avec un krach obligataire provoqué par la détermination des banques centrales à lutter contre l’inflation pour éviter de revivre le choc des années 1970. Face à la très belle résilience des profits des entreprises qui, dans l’ensemble, sont parvenues jusqu’à présent à défendre leur marge en remontant leurs prix,la forte remontée des taux d’intérêt a conduit à un ajustement à la baisse des ratios de valorisation des actions.
Quels ont été les placements gagnants ?
A.H : Il y en a eu peu. Le dollar a joué un rôle de valeur refuge face au risque géopolitique avec le conflit en Ukraine et à la poussée inflationniste qui a conduit la Réserve Fédérale américaine à relever fortement ses taux directeurs. Le pétrole est également parvenu à tirer son épingle du jeu malgré une faiblesse des flux de transaction liés à la dimension d’énergie carbonée peu compatible avec les valeurs ESG (environnement, société et gouvernance).
Le pic d’inflation est-il atteint ?
A.H : Aux Etats-Unis, les derniers chiffres montrent l’amorce d’une décrue même si les niveaux actuels dépassent encore largement l’objectif de 2% de la Fed. Il existe toutefois des forces déflationnistes à l’œuvre encore imperceptibles, qui vont accélérer le mouvement en 2023. Il s’agit du retournement à la baisse du marché immobilier américain et d’une moindre tension sur les salaires au fur et à mesure d’une remontée du taux de chômage que nous anticipons autour de 4,5% l’an prochain (contre 3,7% actuellement). L’inflation devrait ainsi fortement refluer selon nous vers 3,2% en fin d’année 2023. La Fed aura ainsi gagné son pari tout en ayant parallèlement largement resserré les conditions de financement des agents économiques (ménages et entreprises). Mais attention, ce scénario d’une nette détente de l’inflation demeure conditionnée à la réouverture de l’économie chinoise. C’est capital pour fluidifier les chaînes d’approvisionnement et éviter les pénuries de composants. En zone euro, la normalisation de l’inflation s’annonce plus compliquée. Contrairement aux Etats-Unis où la surchauffe sur les prix provient d’une forte dynamique de croissance post-covid liée à la réouverture de l’économie et des plans de soutien budgétaires massifs, l’inflation en zone euro a pour origine la flambée des cours de l’énergie consécutive à la guerre en Ukraine. Ceci entraîne des hausses de salaire. La décrue de l’inflation risque par conséquent de prendre davantage de temps et le pic ne devrait pas être atteint avant le mois de février 2023. Le risque est que la Banque Centrale Européenne ne relève sa politique monétaire de façon disproportionnée et aggrave ainsi la récession annoncée. Pour autant, le rebond de l’euro permettra de réduire l’inflation importée sur les prix de l’énergie.
Faut-il craindre une récession aux Etats-Unis et en zone euro ?
A.H : Une récession peut être évitée aux Etats-Unis. L’épargne accumulée pendant les périodes de confinement permettra aux ménages de conserver une dynamique de consommation certes ralentie mais correcte. Le marché de l’emploi va également rester solide en dépit de la remontée attendue du taux de chômage. Le ralentissement de la consommation facilitera le restockage des entreprises et une croissance des exportations. Cette hypothèse ne tiendra que si la Chine réouvre son économie et que l’inflation reflue. Dans le cas contraire, la Réserve Fédérale continuera de resserrer ses taux directeurs à des niveaux difficiles à anticiper. Il ne faudrait pas non plus assister à une amélioration trop rapide des conditions de financement. Les prix de l’immobilier ont besoin de baisser. En zone euro, une légère récession est déjà anticipée avec une contraction des économies allemande et italienne. Nous attendons un repli de 0,4% du PIB de la zone euro cette année. Pas davantage car les ménages devraient continuer de puiser dans leur épargne pour maintenir un certain niveau de vie.
Quels sont enjeux de la nouvelle année ?
A.H : Après l’inflation en 2022, la croissance et la réouverture de l’économie chinoise seront au centre des préoccupations en 2023. La normalisation de la situation sanitaire en République Populaire est une condition impérative à la décrue de l’inflation et donc à des politiques monétaires moins agressives de la part des banquiers centraux. Après avoir fait preuve d’une très belle résilience, les marges et les résultats des entreprises devraient être sous pression. L’effet de ciseau entre baisse du chiffre d’affaires et inflation se fera surtout sentir sur la première partie de l’année. Nous attendons une stabilité des profits des sociétés aux Etats-Unis et une contraction en Europe mais le mouvement est déjà anticipé dans les niveaux de valorisation des actions. Avec un reflux de l’inflation, la détente des rendements des emprunts d’Etat favorisera une revalorisation des multiples des entreprises. A l’instar de 2019, on devrait ainsi assister à un rattrapage des indices malgré une révision en baisse des prévisions de résultats.
Etes-vous positif sur les actions ?
A.H : Oui, nous nous attendons à un rebond des marchés actions de l’ordre de 6% à 8% en intégrant les dividendes. Les banquiers centraux devraient volontairement maintenir une rhétorique de fermeté dans leur message qui créera de la volatilité. Il conviendra alors d’exploiter ces opportunités pour se positionner à l’achat.
Quelles sont les grandes thématiques à jouer ?
A.H : Le secteur financier européen devrait continuer de bien se comporter et profiter de l’effet positif de la remontée des taux d’intérêt sur les banques et les compagnies d’assurance. La transition écologique restera également une thématique porteuse sur toute la chaîne de valeur que ce soit sur les industriels pénalisés l’an dernier par la pénurie de composants ou les distributeurs. Le phénomène de relocalisation de la production aux Etats-Unis devrait profiter au segment des petites et moyennes capitalisations. Les petites valeurs de la tech à la fois innovantes et rentables sont susceptibles de mieux tirer leur épingle du jeu que les géants, les fameux GAFAM (Google, Amazon, Meta -ex-Facebook- Apple ou Microsoft) et de bénéficier d’un environnement de taux d’intérêt plus apaisé. La résilience et la faible valorisation du secteur de la santé demeurent un atout encore à exploiter. Il est, en revanche, un peu tôt pour s’intéresser au compartiment de l’automobile malgré des niveaux de valorisation largement décotés. La production ne va pas repartir tout de suite et une forte concurrence se dessine dans l’électrique avec la Chine. Davantage que les équipementiers, il est préférable de privilégier les constructeurs. Enfin, les placements obligataires redeviennent attractifs avec des rendements élevés qui rémunèrent le risque, ce qui n’était plus le cas ces dernières années.
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