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Antoine Doutriaux, directeur général de Plastivaloire: « nous retrouvons de la flexibilité financière »

Le dirigeant de cet équipementier automobile revient sur la forte dynamique de l’activité constatée depuis deux trimestres qui l’on amené à revoir à la hausse ses prévisions annuelles avec l’objectif de redresser la rentabilité.

La lettre de la bourse : Après une croissance de l’activité de 24% au premier semestre de l’exercice 2022/2023, le chiffre d’affaires de Plastivaloire a encore progressé de 23,5% sur le troisième trimestre. Comment expliquez-vous ce dynamisme ?

Antoine Doutriaux : nous sommes effectivement satisfaits de ce retour à la croissance et des deux derniers trimestres qui sont historiques en termes d’activité, à plus de 200 millions d’euros de facturations chacun. C’est le fruit des prises de commandes passées au cours des dernières années et du rétablissement du marché automobile qui progresse en moyenne d’environ 7% sur un an après avoir été ralenti par les problèmes de pénuries de composants et de désorganisation de la supply chain. Nous avons pu retrouver des conditions de production normales sans les périodes de « stop & go » que nous avions connu précédemment.

La lettre de la bourse : pour autant, la rentabilité n’est toujours pas au rendez-vous. Quel genre de difficulté rencontrez-vous ?

A.D. Au premier semestre, notre Ebitda a atteint 7,9% du chiffre d’affaires en légère amélioration par rapport aux 7,1% de la même période de l’exercice précédent, mais ce niveau reste très loin des marges à deux chiffres que nous avions avant la crise sanitaire. Le principal facteur pénalisant est l’inflation. Nous avons connu une forte inflation des matières premières en 2021 et 2022 et depuis 2023 nous faisons face à une forte hausse des prix de l’énergie et des salaires. Même si les cours mondiaux de l’énergie ont fortement reflué ces derniers mois, nous nous sommes couverts sur des prix qui restent aujourd’hui globalement défavorables, notamment en France où il faudra attendre 2024 et 2025 pour nous rapprocher des prix du marché redevenus beaucoup plus sages. Nous n’avons pas répercuté toute cette inflation à nos clients. Au 31 mars dernier, nous n’en avions répercuté que 50%. C’est un travail qui prend du temps et que nous continuons de mener à bien.

La lettre de la bourse : de quelle visibilité disposez-vous sur vos activités automobiles ? L’électrification des véhicules constitue-t-elle un enjeu particulier pour le groupe ?

A.D. Notre carnet de commandes est plutôt satisfaisant au regard du pic de lancements et de commandes auxquels nous allons répondre dans les douze mois qui viennent. L’entrée sur un nouveau programme nous procure une bonne visibilité sur les cinq ans à venir. La croissance future viendra à la fois de l’Europe et des Etats-Unis, sachant que notre potentiel est important outre Atlantique, où le contenu que nous apportons par voiture est encore faible. En Asie, nous sommes absents sur le plan industriel car il me semble que l’Eldorado de l’industrie automobile en Chine est désormais derrière nous. Les constructeurs chinois ont acquis un niveau de maturité très important et auront moins recours aux fournisseurs occidentaux que par le passé.

Pour le moment, nous sommes assez peu sensibles au phénomène d’électrification des véhicules dans la mesure où nous produisons surtout des pièces d’habillage intérieur, des pièces pour cockpit et des pièces à l’extérieur du véhicule. En revanche nous sommes peu présents sous le capot moteur mais nous avons gagné un certain nombre de contrats dans le domaine des batteries qui nous permet d’entrer sur ce marché de l’électrification comme une opportunité.

La lettre de la bourse : Quels sont vos objectifs pour l’ensemble de l’exercice ?

A.D. Nous restons prudents sur l’évolution du marché automobile pour le deuxième semestre calendaire, mais nous relevons malgré tout notre objectif de chiffre d’affaires annuel entre 810 et 830 millions d’euros, au lieu de 780 millions précédemment sachant que le bas de notre nouvelle fourchette suppose une baisse d’activité au dernier trimestre, ce qui peut paraitre prudent de notre part. Quant à la rentabilité, elle devrait traduire une légère amélioration entre le premier et le deuxième semestre grâce aux actions menées pour atténuer l’impact inflationniste sur les coûts.  Nous devrions bénéficier à partir de l’an prochain de prix de matières premières et de l’énergie plus favorables.

La lettre de la bourse : Vous avez annoncé un plan de restructuration financière en juillet. Quelles en sont les grandes lignes ?

A.D. Le groupe a fait plusieurs acquisitions au cours des dernières années et est entré dans la crise du covid avec un niveau de dette élevé. Nous avons ensuite fait face aux tensions sur les approvisionnements, sur les prix des matières, de l’énergie et sur les salaires. Tout cela a mis nos marges sous tension ainsi que notre trésorerie.  Il fallait donc retrouver de la flexibilité ce que nous avons fait au début de l’été en obtenant un rééchelonnement de nos échéances bancaires et en obtenant un prêt garanti par l’Etat de 40 millions d’euros, auquel il faut ajouter un apport en fonds propres de 1 million d’euros de l’actionnaire familial. Nous avons besoin de ces ressources pour financer notre croissance soutenue. Il ne faut pas oublier que notre business model est consommateur de cash puisque nous portons dans notre bilan les coûts de développement des nouveaux produits ainsi que les coûts des outillages et des machines.

La lettre de la bourse : l’endettement net qui représente 100% des fonds propres n’est-il pas encore trop élevé ?

A.D. Notre ratio d’endettement est élevé mais il est difficile d’augmenter le capital aux niveaux de cours actuels car la dilution pour les actionnaires serait trop importante. Nous devons donc nous focaliser sur la restauration de nos marges pour générer du cash-flow et nous désendetter. Le deuxième semestre de notre exercice 2022/2023 s’inscrira sur cette tendance et marquera le retour à une génération de cash positive. Nous avons demandé à nos actionnaires de nous accompagner dans cette période de trésorerie tendue en renonçant au dividende jusque juin 2027.

La lettre de la bourse : où en est votre stratégie de diversification en dehors de l’automobile ?

A.D. : Au terme des neuf premiers mois de notre exercice 2022/2023, le secteur automobile représentait encore 81% de notre chiffre d’affaires et les autres secteurs de l’industrie 19%. Notre objectif est toujours d’accélérer la diversification pour parvenir à terme à 25% de nos ventes hors de l’automobile pour diversifier les clients et les modèles de marché. Cela prendra du temps compte tenu de la croissance organique soutenue de l’automobile à court et moyen terme et il faudra sans doute de nouvelles acquisitions dans l’industrie mais seulement lorsque nous aurons commencé à restaurer l’équilibre de notre bilan.

La lettre de la bourse : Quelles sont vos ambitions en matière de critères ESG?

A.D. : Nous sommes très sensibles à ce sujet. L’an dernier, nous avions communiqué surtout sur la partie environnement et nous allons progresser dans ce domaine avec l’arrêt de nos activité chrome. En matière de gouvernance, l’actionnaire familial a séparé les rôles de président et de directeur général en juillet 2022 et ce système fonctionne très bien. Sur le plan social, nous travaillons sur la sécurité de nos salariés et sur d’autres actions destinées à leur bien-être.

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