Pascal Imbert, Président Directeur général de Wavestone : « Nous sommes prêts à réaliser d’autres acquisitions »
Malgré un ralentissement du marché du conseil, Wavestone est parvenu à afficher une performance semestrielle d’excellente qualité. Ambitieux, le groupe vient d’intégrer une cible d’envergure Q_Perior et reste à l’affût d’opérations de croissance externe en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Son patron, Pascal Imbert, nous livre les secrets de la réussite de son groupe et se projette à plus long terme avec des objectifs élevés.
Quel regard portez-vous sur les comptes semestriels du groupe ?
Pascal Imbert : Les premiers mois de l’exercice 2023/24 ont été dynamiques, nous permettant de dégager une croissance et une rentabilité solides.
Dans le détail, Wavestone a dégagé une croissance soutenue de 17%, dont 12% à un rythme organique en dépit d’un effet jour défavorable de -2,2%. Le taux d’activité s’est progressivement rétabli après le fléchissement du quatrième trimestre 2022/23, les prix de vente sont demeurés solides, conduisant à un bon ratio prix de vente sur salaires, et les coûts ont été maîtrisés. La marge opérationnelle courante s’est établie à 13,3%, contre 12,5% un an plus tôt, malgré l’effet calendaire défavorable.
Pour autant, ce solide premier semestre ne doit pas nous faire oublier que l’environnement de marché est difficile et incertain, avec une demande globalement ralentie et des clients plus attentistes dans l’engagement de leurs dépenses de conseil.
Comment parvenez-vous à maintenir une croissance organique du chiffre d’affaires aussi forte (+12%) sur un secteur en ralentissement ?
P. I : La progression embarquée des effectifs, engrangée au terme de l’exercice 2022/2023 nous a bien aidé. Pour mémoire, en 12 mois, nous étions passés de 3 732 collaborateurs à 4 406 collaborateurs.
Mais le levier essentiel a été l’intensification de notre action commerciale, entreprise depuis déjà plusieurs trimestres. Une action commerciale que nous avons veillé à diriger vers les secteurs et les domaines d’intervention les plus porteurs.
Quels sont justement les secteurs d’activité les plus porteurs et ceux plus attentistes ?
P. I : Certains secteurs comme la banque, le retail ou le secteur public sont particulièrement impactés, avec une demande globalement ralentie. Mais heureusement d’autres secteurs tels que l’assurance, l’énergie, le luxe, ou encore le transport font preuve de résilience et recèlent toujours des opportunités intéressantes. A nous de savoir capter et transformer ces opportunités, en maintenant une action commerciale vigoureuse et en faisant preuve d’agilité.
Au-delà de ces tendances sectorielles, nous observons que les projets à dominante technologique se montrent particulièrement résistants. Que ce soit dans le domaine de la cybersécurité, des infrastructures IT, ou encore qu’il s’agisse de projets Data & IA, avec une mention spéciale quant à la montée en puissance de l’intelligence artificielle générative.
L’inflation salariale s’assagit-elle avec la baisse du turn-over et le ralentissement de la croissance du secteur du conseil ?
P. I : Au cours de l’exercice 2022/2023, nous avions procédé à des ajustements de nos grilles de salaires, notamment pour les jeunes consultants ou ceux disposant de quelques années d’expérience, avec des mouvements se situant entre +2% et +8%, voire un peu plus, en fonction de l’expérience et des pays.
L’impact sur le salaire moyen a toutefois été modéré en 2022/2023, grâce au rajeunissement de nos effectifs sous l’effet d’un recrutement soutenu. Nous connaissons encore en 2023/2024 un effet embarqué de ces décisions prises l’an dernier, mais la bonne orientation de nos prix de vente nous permet de maintenir un bon ratio de prix de vente sur salaires.
Le taux d’activité, remonté à 73% au premier semestre, est-il perfectible ? Jusqu’où peut-il monter ?
P. I : Il nous reste encore des marges de progrès. Notre objectif est de poursuivre la progression du taux d’activité jusqu’à revenir à 75%, notre niveau normatif.
Mais le contexte de marché rend incertain le fait de revenir à ce niveau avant la fin de l’exercice 2023/2024, fin mars 2024.
Le groupe dispose-t-il encore de levier pour optimiser sa structure de coûts ?
P. I : Oui, nous pensons que nous avons encore la possibilité d’améliorer certains de nos processus opérationnels et ainsi dégager de nouvelles marges de manœuvre pour le développement du cabinet.
Ces optimisations nous permettront en premier lieu de consacrer plus de ressources à des sujets stratégiques pour Wavestone, par exemple la promotion de la marque ou l’utilisation de l’intelligence artificielle.
Comment abordez-vous le défi de l’intelligence artificielle générative ? Est-elle déjà intégrée à vos solutions proposées à vos clients ?
P. I : La vitesse d’adoption et de déploiement de l’IA générative dans les entreprises promet d’être sans égale pour une rupture technologique de cette ampleur. De nombreux clients nous font travailler sur les cas d’usage qui créeraient de la valeur dans leur activité, en améliorant l’efficacité opérationnelle (exemple : automatiser l’analyse des remontées d’alertes financières dans le secteur bancaire), en enrichissant l’expérience client (exemple : assister des vendeurs dans le secteur de la consommation), voire en imaginant de nouveaux services.
Le développement de l’intelligence artificielle va également renforcer d’autres pans de notre activité. Avec l’IA apparaissent en effet de nouveaux risques en termes de cybersécurité, de protection des secrets professionnels et des données personnelles, et même en termes d’éthique.
Même s’il est encore tôt pour quantifier l’ampleur de la vague créée par l’intelligence artificielle, nous sommes certains que son développement va avoir une contribution de premier plan à la croissance du chiffre d’affaires de Wavestone dans les années à venir.
L’assemblée générale des actionnaires de Wavestone du 5 décembre a validé le rachat de Q_PERIOR. Qu’attendez-vous de cette opération ? Quel délai vous fixez-vous pour l’intégrer et hisser sa marge au standard du groupe ?
P. I : Ce rapprochement est transformant et stratégique pour Wavestone. Jusqu’alors champion français du conseil, Wavestone prend place dans la catégorie des grands cabinets de conseil internationaux.
Ce changement de taille, notre nouvelle envergure internationale et notre proposition de valeur élargie vont désormais nous permettre d’accéder chez nos clients à de nouvelles opportunités pour servir leurs transformations les plus globales. C’est une évolution qui nous ouvre de nouveaux espaces de croissance, auprès de nos clients actuels mais surtout auprès des nouveaux grands comptes internationaux que nous pouvons désormais cibler.
Wavestone pèse désormais près de 850 millions de chiffre d’affaires et compte plus de 5 500 collaborateurs. Nous sommes maintenant présents dans 17 pays, avec des positions de leader sur trois des principaux marchés d’Europe continentale (Allemagne, France et Suisse), et de solides implantations au Royaume-Uni, en Amérique du Nord et en Asie.
Sur le premier exercice complet de consolidation de Q_PERIOR, l’exercice 2024/2025, nous nous sommes fixés pour objectif de réaliser un chiffre d’affaires de 1 milliard, pour un résultat opérationnel courant d’au moins 130 millions.
A plus long terme, nous avons l’ambition de faire progresser la rentabilité du nouvel ensemble vers 15% de marge opérationnelle courante, probablement dans les deux ans après cette première étape, en fonction des conditions de marché que nous rencontrerons.
La priorité est-elle d’intégrer Q_PERIOR ou le groupe reste-il à l’affût d’autres opérations de croissance externe ?
P. I : Wavestone a la volonté de poursuivre son développement à un rythme soutenu, en visant un rythme de croissance annuel moyen de +15% sur le long terme, en combinant croissance organique et croissance externe. S’agissant de la croissance externe, le nouvel ensemble se veut une plateforme particulièrement attractive en vue de futures acquisitions. Nous sommes donc prêts à réaliser d’autres acquisitions, dès les prochains trimestres, notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis, qui constituent des géographies clés pour nos clients. A moyen terme, nous envisagerons également un renforcement des positions déjà constituées en Asie.
Où en sont vos ambitions aux Etats-Unis et au Royaume-Uni ?
P. I : Au Royaume-Uni, Wavestone a réalisé coup sur coup sur l’exercice 2022/2023, à quelques semaines d’intervalle, les acquisitions de PEN Partnership et Coeus Consulting, créant les conditions d’un changement de dimension de Wavestone au Royaume-Uni avec la volonté de constituer un acteur majeur sur le marché du conseil outre-Manche. Ces acquisitions sont un succès, avec une dynamique de croissance soutenue et une solide rentabilité au premier semestre 2023/2024. Wavestone devrait réaliser un chiffre d’affaires de l’ordre de 50 millions de livres sur l’exercice en cours au Royaume-Uni et nous avons la volonté d’y poursuivre notre développement.
Aux Etats-Unis, Wavestone évolue en revanche dans un environnement de marché difficile, qui nous a conduit à ralentir notre effort de recrutement dans la région au cours des derniers mois. Nous visons de réaliser un chiffre d’affaires à peu près stable sur l’exercice, pour une rentabilité opérationnelle qui pourra aller de 0% à 5%. L’Amérique du Nord est un marché clé dans l’univers du conseil, et nous comptons tirer parti de notre nouvelle dimension pour nous y développer. Cela passera par la réalisation de nouvelles croissances externes outre-Atlantique.
Quelles sont les perspectives de Wavestone pour cette année ? A plus long terme ?
P. I : En dépit de l’environnement plus incertain, nous avons confirmé nos objectifs annuels à l’occasion de nos résultats semestriels début décembre. Nous nous sommes fixés de réaliser un chiffre d’affaires annuel supérieur à 580 millions, soit une croissance de 9% dont 7% à périmètre constant, et de dégager une marge opérationnelle courante annuelle aux alentours de 15%. Ces objectifs ne tiennent évidemment pas compte de l’impact de la consolidation Q_PERIOR, effective depuis le 1er décembre 2023.
Avec Q_PERIOR, l’objectif du nouveau cabinet est de réaliser à l’issue de l’exercice 2024/2025, un chiffre d’affaires de l’ordre de 1 milliard, hors nouvelles acquisitions, pour un résultat opérationnel courant d’au moins 130 millions. Et à plus longue échéance, le cabinet ambitionne de se développer à un rythme de croissance annuel moyen de 15%, combinant croissance organique et externe, et vise une marge opérationnelle courante normative de l’ordre de 15%.
Conseils sur Wavestone
Tous les conseilsWavestone : touché mais pas coulé !
Le groupe de conseil est sans surprise touché par la faiblesse de la demande mais il devrait maintenir une croissance positive de son activité sur l’ensemble de son exercice 2024/2025. La récente chute du cours de bourse peut constituer une opportunité pour se positionner.
Wavestone où la culture de l’excellence
Le marché a de nouveau salué la performance supérieure aux attentes de ce plus gros cabinet français de conseils indépendant et son changement de taille lié à la réussite de l'intégration en cours de la filiale allemande Q_Perior. La visibilité reste excellente et le titre est loin d'être hors de prix.
Wavestone, quel potentiel?
Le titre de ce cabinet de conseil indépendant subit des prises de bénéfices dans un environnement moins porteur où les donneurs d'ordre font preuve d'un certain attentisme. Le groupe maintient ses objectifs et demeure opportuniste grâce à un bilan solide.
Wavestone cultive l’excellence
Ce cabinet de conseil dans la transformation des entreprises a dévoilé des comptes semestriels d'excellente facture dans un environnement économique pourtant incertain. Il s'apprête à franchir une nouvelle étape avec l'acquisition validée du spécialiste allemand Q_Perior.